À la découverte de la Route des saveurs

Texte de Karine Gagnon pour le Journal de Québec

 
Jocelyne Ouellet, gérante de la boulangerie À chacun son pain, de Baie-Saint-Paul, est une femme sincèrement passionnée et fière de son produit. Photos: Karine Gagnon

Jocelyne Ouellet, gérante de la boulangerie À chacun son pain, de Baie-Saint-Paul, est une femme sincèrement passionnée et fière de son produit. Photos: Karine Gagnon

Habituée des virées gourmandes dans Charlevoix, j’ai découvert une façon des plus rafraîchissantes de m’y adonner tout en sortant des sentiers battus. Il était temps d’ailleurs, puisque ce premier circuit gourmand au Québec fête ses 20 ans.

Même pour les habitués de la région, il y a décidément plein de petits trésors cachés qui n’ont assurément pas encore croisé votre chemin. C’était mon cas avant de parcourir une portion de la Route des saveurs, initiative née un an après que la région se fut dotée d’une politique agroalimentaire, en 1995.

Il y aura cet été 50 arrêts possibles dans un rayon de 50 km, parmi des restaurateurs, producteurs et transformateurs, m’a indiqué Patrick Turcot, président de la Table agro-touristique de Charlevoix, et chef au Fairmont Le Manoir Richelieu. «C’est un circuit dépaysant. On peut le faire en famille, et il y a tout un côté éducatif qui est fort intéressant», souligne-t-il.

Des détours intéressants

Plusieurs des destinations impliquent de petits détours. Et c’est justement là que ça devient intéressant. Je n’ai rencontré que des gens sincèrement passionnés, fiers de leurs produits (que vous pourrez goûter) et qui avaient tous une belle histoire à raconter.

C’est le cas de Jocelyne Ouellet, gérante de la boulangerie À chacun son pain, de Baie-Saint-Paul, dont les patrons ont quitté des emplois d’ingénieurs chez Rolls Royce à Montréal pour fuir la grande ville et relever de nouveaux défis.

Lorsque je suis passée, un autobus venait de «dévaliser ses comptoirs», qui autrement regorgent de pains et pâtisseries confectionnés avec des produits régionaux originaux. On y développe un nouveau pain par mois.

J’ai poursuivi ma route en direction de l’Azulée, où Louise Vidricaire m’attendait sur sa terre aux vertus enchanteresses dans laquelle elle cultive la seule lavande certifiée bio au Québec. Elle s’est avancée avec, sur ses talons, son chien Snowball, un Golden Retriever blanc pour qui j’ai craqué.

Sise sur le chemin de la Pointe à Baie-Saint-Paul, la fermette datant de 1844 ouvre ses portes au public pour la première fois cet été, m’a raconté avec fierté la propriétaire. Son mari et elle y cultivent près de 2000 plants de deux variétés de lavande anglaise, soit Munstead et Hidcote.

Vins et fromages

Mon prochain arrêt m’a entraînée vers la Fromagerie Dufour, où m’attendait une surprise. Le propriétaire Maurice Dufour, agronome de formation, réputé fromager et éleveur de brebis, s’est lancé dans la production de vins. «Je suis un tripolaire agricole», lance le très coloré M. Dufour, membre fondateur de la Table agro-touristique de Charlevoix.

Il en résulte le Charlevoyou, vin biologique (blanc, rouge et rosé) en précertification qui sera offert en 8250 bouteilles cet été, soit près de deux fois plus que l’an dernier.

Il avait planté du Vandal-Cliche il y a 20 ans, sur la terre familiale, comme pour ne jamais oublier son rêve.

À la Ferme Basque de Charlevoix, je retrouve Isabelle Mihura qui élève avec son conjoint Jean-Jacques des canards mulards et de Barbarie.

Les bêtes y sont élevées aux petits soins, en pleine nature, dans les champs attenants à la fermette du couple.

Les visiteurs peuvent déguster les produits cuisinés sur place, dont le fameux foie gras et les rillettes.

Originaires du Pays basque, tous deux ont appris les bases de l’élevage et du gavage selon les méthodes traditionnelles du Sud-Ouest de la France.

«Nous voulions une petite ferme conviviale, et pour la transformation, nous utilisons les produits locaux», explique la propriétaire.

La Malbaie

En route vers La Malbaie, où m’attend le chef Mario Chabot, de l’Auberge des Trois Canards, l’un des plus anciens établissements de Charlevoix. J’ai pu goûter le délicieux saumon fumé le matin même, grâce à une technique artisanale qu’il a développée.

L’auberge a toujours été réputée pour sa table, note la propriétaire, Hélène Marchand. Le fait que toutes ses chambres offrent une vue à couper le souffle sur le fleuve, avec balcons, n’est pas à négliger non plus.

Après une nuit confortable, me voilà en direction des Champignons Charlevoix pour y rencontrer Danielle Ricard, qu’on a pu voir à l’émission Dans l’oeil du dragon. S’ils n’ont pas eu d’entente, la visibilité ainsi générée leur a permis d’augmenter leur chiffre d’affaires de 225 % le mois suivant leur passage à la télé.

Son conjoint et elle produisent huit à 10 tonnes de champignons pleurotes par année, selon une méthode unique. Ils en transforment la presque totalité. Les divers produits ne contiennent pas d’additif ni agent de conservation. La cuisine avec boutique que rêvait d’aménager Mme Ricard à même ses installations ouvrira ses portes juste à temps pour l’été.

Je termine mon parcours gourmand avec une visite à la ferme Caprivoix, à Saint-Hilarion, où Sophie Talbot et son conjoint élèvent des chèvres de boucherie et des bœufs Highland. Le site offre un magnifique coup d’œil sur les montagnes de Charlevoix. En plus de voir les animaux dans les pâturages, les visiteurs peuvent visiter la miniferme.

Comme plusieurs d’entre vous, je n’avais jamais goûté de chèvre, et ce, même si c’est la viande la plus consommée au monde. Ça vaut la peine d’oser!

Les découpes sont les mêmes que celles de la viande d’agneau, bien que le goût soit très différent. On y trouve aussi plusieurs produits transformés tels que cretons, saucisses, pâtés et terrines.

Depuis mon retour à Québec, j’ai juste hâte de retourner dans Charlevoix en touriste pour découvrir les autres endroits du circuit.

Pour en savoir plus: www.routedesaveurs.com

À chacun son pain, Baie-Saint-Paul

Boulangerie-café où vous pourrez goûter une vingtaine de variétés de pains et des pizzas au four à bois, une excellente soupe aux gourganes (foi de fille du Saguenay), des croissants au Migneron, et le meilleur pouding aux pains que ma voisine de table avait mangé de sa vie, lequel regorge de bleuets. Le concept fait des petits, à Beaupré notamment.

Champignons de Charlevoix

Le couple de propriétaires cultive des pleurotes depuis 14 ans, selon une méthode artisanale et à l’aide de bran de scie de tremble prélevé sur leur terre à bois familiale, pour un goût et des propriétés exceptionnels. «On ne produit aucun déchet», dit avec fierté Danielle Ricard, qui a quitté son métier de graphiste pour exercer cette passion. Outre le pesto aux pleurotes et tomates séchées, produit vedette, le «pleurote délicieux» à l’italienne ou piquant est un régal.

Fairmont Le Manoir Richelieu

Les produits régionaux sont à l’honneur dans les restaurants du Fairmont Le Manoir Richelieu, où le chef Patrick Turcot se fait un devoir – et un plaisir – de les utiliser. Le président de la Table agroalimentaire de Charlevoix, qui a auparavant travaillé aux côtés de Jean Soulard, au Château Frontenac, puis comme chef dans des hôtels Fairmont dans l’Ouest canadien et aux États-Unis, n’utilise entre autres à peu près que des fromages de Charlevoix. En saison, les fruits et légumes de la région trônent également dans les assiettes.

Auberge des trois canards

L’auberge tient son nom d’anciens propriétaires, trois médecins que les villageois surnommaient «the three ducks». Hélène Marchand tient à conserver le style champêtre de l’établissement, qui fait son charme. Parmi les classiques de sa table: ris de veau, veau aux noisettes, saumon fumé et cailles aux champignons sauvages.

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Ferme basque de Charlevoix

Petite nouveauté cet été, les visiteurs pourront non seulement observer les canards en liberté, mais pourront aussi prendre connaissance de diverses informations et anecdotes les concernant. Fille de restaurateur basque, Isabelle Mihura a décoré la boutique avec des piments séchés, référence à sa région natale qui produit les fameux piments d’Espelette. Elle a d’ailleurs créé un foie gras avec cet ingrédient.

Maison d’affinage Maurice Dufour, Baie-Saint-Paul

Je connaissais déjà plusieurs fromages de cette maison, dont évidemment le Migneron et aussi le Ciel de Charlevoix. J’ai découvert le délicieux Secret de Maurice, un fromage unique au monde dont la croûte fleurie renferme une pâte blanche coulante. On le croirait sorti du four, mais il est bel et bien frais. On enlève la calotte, et on déguste. À essayer absolument.

Ferme Caprivoix

Sophie Talbot et son conjoint sont des gens très occupés. En plus de leur entreprise, et de leurs centaines d’animaux, ils ont aussi trois enfants, et Mme Talbot occupe un emploi à temps plein comme agente de protection de la faune. «On est super passionnés, on aime ça», me dit-elle avec un beau sourire.

Hélène Chicoine